Eugène BELLEGUIC

1809-1878

L’autre pionnier douarneniste

Si les amateurs éclairés d’histoire de l’aviation connaissent généralement Le Bris (au moins de nom), en revanche plus rares sont ceux qui ont entendu parler d’Eugène Béléguic et de son oeuvre théorique.

Et pourtant, son nom est indissociable de celui de Le Bris, étant comme lui douarneniste, de la même gérération, et leurs familles étant liées par des relations d’affaires. Le propre frère d’Eugène, le juge de paix Jean-Guillaume Béléguic, est même signalé par La Landelle parmi les témoins de l’envol de Le Bris et on le retrouve à Brest en 1868 lorsque Le Bris y construit son Albatros.

Yves Peslin lui a consacré un article dans Les Cahiers de l’Iroise, mais sans conteste le meilleur papier à son sujet est l’ouvrage de Michel Mazéas Des Bretons dans l’histoire de l’aviation (2001) qui ne se contente pas d’un survol de l’oeuvre de pionnier mais s’attache à étudier la place de la famille Béléguic dans l’inovation industrielle douarneniste au milieu du XIXe siècle.

 

Eugène Béléguic est né à en 1809 à Poulan-sur-mer (Finistère), au quartier de Tréboul qui fait aujourd’hui partie de Douarnenez. Officier de Marine, issu d’une famille de gros commerçants, ses premiers travaux portaient sur l’étude des fluides et des voiles pour navires (son nom reste attaché au Ris Béléguic, un perfectionnement des voiles, et à un type de carène utilisée sur aviso construit en 1866).

Dès 1852, c’est à dire avant même La Landelle, et alors que Le Bris n’avait pas encore entrepris ses premiers travaux concrets, il s’était fait le défenseur du plus lourd que l’air, et en 1860, partisan de l’hélice il expliqua comment en remplaçant le câble de traction d’un cerf-volant par un moteur, on pourrait faire voler un plus lourd que l’air.

Poursuivant ses études sur le vol des oiseaux, il était parvenu à la conclusion que l’aéroplane du futur devrait se présenter sous la forme d’une « nacelle avec une machine ou un moteur et des plans de suspension, un gouvernail, une ou deux hélices fonctionnant entre des surfaces comprimant l’air, des roues pour prendre sa course jusqu’à la vitesse suffisante pour se détacher du sol« . Et ainsi « l’air comprimée de la sorte élèverait le jeu de propulsion (…) et l’on pourrait réduire les dimensions et le poids de l’organe propulseur » ; une pensée qui annonçait bien avant Henri Coanda, le principe de la propulsion par réaction.

La question de l’équilibre longitudinal de l’engin bloquait les théories de Béléguic, mais ses travaux furent néanmoins considérés comme capitaux pour l’aéronautique et La Landelle parlait de lui comme d’un inventeur dont les travaux faisaient alors autorité. Intellectuel cultivé, Eugène Béléguic n’hésitait pas à affirmer qu’avec « les connaissances actuelles, physiques, chimiques et mécaniques, la navigation aérienne est non seulement possible mais facile à réaliser ».

Admis à la retraite en mai 1867, il se retira à Brest où il avait de la famille. Comment dans ces conditions ne pas penser qu’il y ait assisté, dès l’année suivante, aux essais de Le Bris, et qu’il se soit rendu au port comme beaucoup d’autres Brestois pour voir l’Albatros. En 1868, Béléguic écrivait en effet des chroniques maritimes et météorologiques pour le journal l’Armoricain qui a soutenu le projet de Le Bris par une souscription publique.

Bibliographie

Charles-Yves Peslin Le capitaine de frégate Béléguic, précurseur de l’aviation dans Les Cahiers de l’Iroise, Brest, 1955.

Michel Mazéas L’apport d’Eugènes Béléguic, précurseur de l’aviation et de sa famille dans Des Bretons dans l’histoire de l’aviation, Mémoire de la Ville n°35, Douarnenez, 2001.

Thierry Le Roy Les Bretons et l’aéronautique des origines à 1939, PUR, Rennes, 2002.

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